Cour d’Appel de Bordeaux 1ère Chambre Civile Section A – 12 décembre 2016

Par cet arrêt important, la Cour de BORDEAUX précise la responsabilité du Notaire chargé de recevoir l’acte de cession d’un fonds de commerce.

En l’espèce, Monsieur G. avait acquis un fonds de commerce dépendant d’une liquidation judiciaire.

Le preneur avait été autorisé par le Juge Commissaire du Tribunal de Commerce à entrer en jouissance dès la date du 13 septembre 2004, l’acte authentique étant intervenu ultérieurement.

Un mois avant la passation de l’acte authentique, le propriétaire du local commercial (voir le droit commercial) avait fait signifier au preneur un congé qui devait être déclaré nul au terme d’une longue procédure judiciaire ayant mené les parties devant la Cour de Cassation et deux fois devant la Cour d’Appel de BORDEAUX.

Nonobstant l’annulation de ce congé, le preneur devait cependant être privé de son droit au bail et être contraint de quitter les lieux sans indemnité d’éviction pour avoir fait délivré une demande de renouvellement postérieure au congé, alors qu’il n’était pas immatriculé au Registre du Commerce et des Sociétés et qu’il ne l’était toujours pas à la date à laquelle le bailleur lui avait notifié un refus de renouvellement.

La Cour confirme un jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX du 2 avril 2015 qui avait consacré la responsabilité du Notaire rédacteur de l’acte de cession du fonds de commerce.

La Cour estime que c’est à bon droit, pour des motifs qu’elle fait siens, que le Tribunal, après avoir rappelé le cadre réglementaire issu des dispositions de l’article 27 du décret n°84-406 du 30 mai 1984, devenu l’article R.123-89 du Code de Commerce qui prévoit que le Notaire qui rédige un acte comportant pour les parties intéressées une incidence quelconque en matière de registre, est tenu de procéder aux formalités correspondantes, à peine d’une amende, de sanctions disciplinaires et de l’engagement de sa responsabilité, a souligné que le Notaire se devait, en l’espèce, de donner toutes informations utiles à Monsieur G. en raison de la date du bail cédé et du terme contractuel alors, au surplus, qu’il s’agissait d’un débit de boissons et que l’obtention d’une licence est obligatoire pour toutes exploitation de ce type.

Elle ajoute que l’obligation de procéder aux formalités correspondant à la cession de ce fonds de commerce incombait au Notaire qui devait réclamer aux parties les documents utiles à la pleine efficacité de son acte, y compris ceux afférents à la mutation de la licence IV, estimant que la mention dans l’acte de la phrase « Le cessionnaire fera auprès du Bureau des Déclarations de la Direction Générale des Impôts et de la Mairie de BORDEAUX toutes démarches et déclarations utiles pour faire opérer le transfert de la licence à son nom » ne satisfaisait pas à l’obligation d’informer Monsieur G. de l’obligation de joindre la déclaration de mutation de la licence IV au dossier d’immatriculation.

Elle précise qu’il incombe au Notaire, tenu de s’assurer de l’efficacité de l’acte auquel il prête son concours, de procéder, sans même qu’il ait reçu mandat pour ce faire, aux formalités prescrites pour cet acte, dont le client se trouve ainsi déchargé, rappelant la jurisprudence issue de l’arrêt de la Chambre Civile de la Cour de Cassation du 6 octobre 2011 (n°10-30.797) considère ainsi que c’est par d’exacts motifs que le Tribunal a considéré que le Notaire avait commis une faute, laquelle était en lien causal avec le préjudice subi par Monsieur G. en ce que, par sa faute, celui-ci n’a pu bénéficier du statut des baux commerciaux.

Celui-ci a ainsi été condamné à payer à Monsieur G. le montant de l’indemnité d’éviction qui avait été fixée à dire d’expert, condamnation qui avait déjà été prononcée par les premiers Juges.

La Cour y ajoute le poids de l’indemnité d’occupation que Monsieur G. avait dû payer en pure perte au bailleur.