Ecole des Avocats ALIENOR – BORDEAUX – 06.11.2014 – 16h30

Sur la déontologie de la médiation – PAR MONSIEUR LE BATONNIER MICHEL DUFRANC
Selon le Larousse : « La déontologie (du grec deon-ontos, ce qu’il faut faire, et logie, la doctrine), c’est l’ensemble des règles et des devoirs qui régissent une profession, la conduite de ceux qui l’exercent, les rapports entre ceux-ci et leurs clients et le public. » Si l’on s’en tient à cette définition, on ne peut parler de déontologie de médiation que si l’on considère que la médiation est une activité professionnelle et que le médiateur est un professionnel.

Or, tel n’est pas exactement le cas. Le plus souvent, en effet, le médiateur exerce à titre principal une activité différente relevant ou non d’une profession réglementée, et n’accepte des missions de médiation qu’à titre occasionnel. La définition de la médiation, que ce soit celle du langage courant, ou sa définition juridique, n’aide pas, par ailleurs, à son classement dans le registre des activités professionnelles. Le Larousse définit la médiation comme une entremise, une intervention destinée à amener un accord.

La définition légale n’est guère plus précise, puisque l’article 21 de la loi du 8 février 1995, dans sa version modifiée résultant de l’ordonnance du 16 novembre 2011, indique que la médiation : « s’entend de tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le Juge saisi du litige ».Cette définition résulte d’un texte de transposition de la définition donnée de la médiation par le texte européen, soit l’article 3 de la Directive 2008/52/CE du Parlement Européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale, qui définit la médiation comme : « un processus structuré, quelle que soit la manière dont il est nommé ou visé, dans lequel deux ou plusieurs parties en litige tentent par elles-mêmes, volontairement, de parvenir à un accord sur la résolution de leur litige avec l’aide d’un médiateur, l’article précisant que ce processus peut être engagé par les parties, suggéré ou ordonné par une juridiction ou prescrit par le droit d’un état membre. On trouve encore fort naturellement la même définition au livre 5° du Code de Procédure Civile consacré à la résolution amiable des différends, dont le titre 1er est consacré à la médiation et à la conciliation conventionnelle, ou l’article 1530 indique que la médiation s’entend de tout processus structuré par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord, en dehors de toute procédure judiciaire, en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers choisi par elles ».

Ces processus structurés, destinés à mettre fin à un litige, qui ne renvoient à aucune définition professionnelle précise, qui sont mis en œuvre à l’initiative des parties (la médiation conventionnelle) ou du Juge (la médiation judiciaire) avec le concours d’un tiers, qui peut être une personne physique ou morale, nous dit l’article 1531 du Code de Procédure Civile, choisi parmi des professionnels exerçant des métiers différents, peuvent-ils être soumis à des règles de nature déontologique ?

I. La réponse positive est fournie par les textes eux-mêmes : la directive 2008/52/CE :
– article 3-b : définition du médiateur « On entend par médiateur tout tiers sollicité pour mener une médiation avec efficacité, impartialité et compétence, quelle que soit l’appellation ou la profession de ce tiers dans l’Etat membre concerné, et quelle que soit la façon dont il a été nommé pour mener ladite médiation ou dont il a été chargé de la mener ».
– article 4-qualité de la médiation : « 1°) Les état-membres encouragent pour tous moyens qu’ils jugent appropriés l’élaboration de codes volontaires de bonne conduite et l’adhésion à ces codes par les médiateurs et les organismes fournissant des services de médiation ainsi que d’autres mécanismes efficaces de contrôle de la qualité relatifs à la fourniture de services de médiation. 2°) Les état-membres promeuvent la formation initiale et continue de médiateur afin de veiller à ce que la médiation soit menée avec efficacité, compétence et impartialité à l’égard des parties. »
– article 7 : « Confidentialité de la médiation : 1°) Etant donné que la médiation doit être menée de manière à préserver la confidentialité, les état-membres veillent à ce que, sauf accord contraire des parties, ni le médiateur ni les personnes participant à l’administration du processus de médiation ne soient tenus de produire, dans une procédure judiciaire civile ou commerciale, ou lors d’un arbitrage, des preuves concernant les informations résultant d’un processus de médiation ou en relation avec celui-ci, excepté : a) lorsque cela est nécessaire pour des raisons impérieuses d’ordre public dans l’Etat-membre concerné, notamment pour assurer la protection des intérêts primordiaux des enfants ou empêcher toute atteinte à l’intégrité physique ou psychologique d’une personne, ou b) lorsque la divulgation du contenu de l’accord issu de la médiation est nécessaire pour mettre en œuvre ou pour exécuter ledit accord. 2°) Aucune des dispositions du paragraphe 1°) n’empêche les Etat-membres d’appliquer des mesures plus strictes en vue de préserver la confidentialité de l’indemnisation ou la confidentialité de la médiation. »

Logiquement, l’ordonnance de transposition du 7 novembre 2011 a introduit ces principes dans la loi du 8 février 1995 modifiée :
– article 21-2 : « Le médiateur a accompli sa mission avec impartialité, compétence et diligence, » – article 21-3 : « Sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité. Les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers, ni invoquées ou produites dans le cadre d’une instance judiciaire ou arbitrale, sans l’accord des parties. » Il est fait exception aux alinéas précédents dans les deux cas suivants : a) en présence de raisons impérieuses d’ordre public ou de motifs liés à la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant ou à l’intégrité physique ou psychologique de la personne, b) lorsque la révélation de l’existence de la divulgation du contenu de l’accord issu de la médiation est nécessaire pour sa mise en œuvre ou son exécution.

Et le Code de Procédure Civile rappelle dans ses dispositions consacrées à la médiation conventionnelle : – à l’article 1530 que le tiers choisi par les parties accomplit sa mission « avec impartialité, compétence et diligence », – à l’article 1531 que la médiation est soumise au principe de confidentialité dans les conditions et selon les modalités prévues à l’article 21-3 de la loi du 8 février 1995, dont je viens de rappeler les dispositions.  Les principes déontologiques, dont le respect est imposé par les textes, se résument donc à 4 : – impartialité, compétence et diligence du médiateur, – confidentialité de la médiation. L’article 4 de la directive invite, il est vrai, les Etat-membres, à encourager l’élaboration volontaire de codes de bonne conduite et l’adhésion à ces codes par les médiateurs et les organismes fournissant des services de médiation, ainsi que d’autres mécanismes efficaces de contrôle de la qualité relatifs à la fourniture de services de médiation (IFS).

Antérieurement à l’adoption de la Directive, le Conseil de l’Europe avait, en 2004, publié un Code de Conduite Européen pour les Médiateurs énonçant une série de principes que chaque médiateur pouvait volontairement s’engager à respecter sous sa propre responsabilité, ce code étant censé applicable à tous les types de médiation en matière civile et commerciale. Et postérieurement à l’adoption de la directive, les principales organisations professionnelles de la médiation en France ont élaboré un Code de Déontologie du Médiateur et de la Médiation, qui définit un socle commun de valeurs et de pratiques de la médiation, à l’effet d’accompagner l’évolution suggérée par la Commission Européenne.

 

II. J’examinerai brièvement les dispositions de ces codes, qui n’engagent que les seuls médiateurs ayant accepté d’y souscrire, tout manquement de leur part étant dans ce cas seulement susceptible d’être sanctionné par la mise en œuvre de leur responsabilité civile professionnelle, sauf si le médiateur appartenant à une profession réglementée est, au regard des règles de sa profession, susceptible de justifier l’engagement d’une procédure disciplinaire. A. LE CODE DE CONDUITE EUROPEEN POUR LES MEDIATEURS Il prévoit des dispositions relatives : – 1°) à la compétence, à la désignation, à la rémunération des médiateurs et à la promotion de leurs services, – 2°) à l’indépendance et à l’impartialité des médiateurs, – 3°) à la procédure de médiation, – 4°) à la confidentialité. B. LE CODE NATIONAL DE DEONTOLOGIE DU MEDIATEUR ET DE LA MEDIATION Il est articulé autour : – 1°) d’un groupe de règles garantes de la qualité de médiateur, – 2°) d’un groupe de règles garantes du processus et des modalités de la médiation

 

III. Nous venons de voir que la médiation ne renvoie pas à l’exercice d’une profession au sens où on l’entend habituellement, mais qu’elle relève de missions conventionnelles ou judiciaires, acceptées le plus souvent à titre occasionnel par des professionnels appartenant ou pas à des professions réglementées. Son exercice est cependant soumis au respect de certaines règles de nature déontologique inscrites dans les textes de loi qui la fondent, et développées dans des codes de déontologie qui sont opposables aux médiateurs, dans la mesure où ils ont souscrit à ces règles. Nous avons vu également que l’activité de médiateur n’étant pas organisée au sein d’une profession réglementée, le seul recours contre des manquements éventuels d’un médiateur à ces obligations ne peut se résoudre que dans le cadre d’une action en responsabilité civile, aucune action de nature disciplinaire n’étant à priori susceptible d’être engagée à l’encontre d’un médiateur à raison de son activité dans le cadre d’une mission de médiation.

 

Qu’en est-il de l’Avocat médiateur ?

A) Mais d’abord, un Avocat peut-il être médiateur ? 1°) La réponse affirmative est fournie par l’article 115 du décret du 27 novembre 1991, ainsi conçu : « La profession d’Avocat est incompatible avec l’exercice de toute autre profession, sous réserves de dispositions législatives ou réglementaires particulières. La profession d’Avocat est compatible avec les fonctions d’enseignement, les fonctions de collaborateur de Député ou d’assistant de Sénateur, les fonctions de suppléant d’un Juge d’instance, de membre assesseur des Tribunaux pour Enfants ou des Tribunaux Paritaires de Baux Ruraux, de conseillers prud’hommes, de membres des Tribunaux des Affaires de Sécurité Sociale, ainsi qu’avec celles d’arbitre, de médiateur, de conciliateur ou de séquestre ». Le traité déontologique d’ADER et DAMIEN considère même que l’activité de Médiateur de la République ou de Délégué de celui-ci paraît entrer dans le cadre de l’activité professionnelle autorisée de l’Avocat. Il faut aussi rappeler que l’article 6bis de la loi du 31 décembre 1971 disposait déjà quant à lui que les Avocats peuvent recevoir des missions confiées par justice, et donc notamment des missions de médiation. Dans ce contexte toutefois, que la médiation soit conventionnelle ou judiciaire, l’Avocat est tenu au respect de sa déontologie professionnelle. Cela résulte des dispositions de l’article 6.2 du Règlement Intérieur National de la profession d’Avocat, qui, après avoir rappelé que l’Avocat peut être investi d’une mission d’arbitre, d’expert, de médiateur, de conciliateur, de séquestre, de liquidateur amiable ou d’exécuteur testamentaire, indique, in fine, que : « Dans l’accomplissement de ces missions, il demeure soumis aux principes essentiels, et doit s’assurer tout particulièrement de son indépendance ». 2°) Revenons aux principes essentiels de la profession d’Avocat Ils sont énumérés à l’article 1.3 du RIN : « Les principes essentiels de la profession guident le comportement de l’Avocat en toutes circonstances. L’Avocat exerce ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité, dans le respect des termes de son serment. Il respecte en outre, dans cet exercice, les principes d’honneur, de loyauté, de désintéressement, de confraternité, de délicatesse, de modération et de courtoisie. Il fait preuve à l’égard de ses clients de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence ». Le RIN renvoyant aux termes du serment, il est également bon de les rappeler, et de rappeler qu’il a valeur légale, puisque sa formule en est dictée par l’article 3 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971 : « Je jure, comme Avocat, d’exercer mes fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ». Le manquement à ces obligations de nature déontologique est sans doute propre à justifier l’engagement à l’encontre de l’Avocat, et donc de l’Avocat médiateur, de sa responsabilité civile professionnelle, si ce manquement a occasionné un dommage à autrui. Mais il risque surtout de conduire l’Avocat défaillant devant le Conseil Régional de Discipline, puisque le respect des principes, règles et devoirs de la profession d’Avocat est prescrit à peine de poursuites disciplinaires par l’article 1.4 du RIN : « La méconnaissance d’un seul de ces principes, règles et devoirs, constitue, en application de l’article 183 du décret du 27 novembre 1991, une faute pouvant entraîner une sanction disciplinaire. » L’article 183 ouvre d’ailleurs le champ du contrôle disciplinaire de l’Avocat au-delà du strict exercice de ses activités professionnelles, puisqu’il dispose que : «Toute contravention aux lois et règlements, toute infraction aux règles professionnelles, tout manquement à la probité, à l’honneur ou à la délicatesse, même se rapportant à des faits extra-professionnels, expose l’Avocat qui en est l’auteur, aux sanctions disciplinaires énumérées à l’article 184 ». Rappelons pour mémoire que ces sanctions sont par ordre de croissance l’avertissement, le blâme, l’interdiction temporaire jusqu’à 3 ans, et enfin la radiation du tableau des Avocats ou le retrait de l’honorariat. B) Ceci étant posé, il convient de rechercher ceux des devoirs professionnels de l’Avocat susceptibles d’être mis en jeu dans le cadre d’une mission de médiation. Ce sont naturellement tout d’abord ceux qui sont en rapport avec les obligations déontologiques imposées à tout médiateur par les textes légaux : – l’impartialité, la compétence et la diligence (article 21-2 de la loi du 8 février 1995 modifiée, et article 1530 du Code de Procédure Civile), – la confidentialité (article 21-3 de la loi du 8 février 1995 modifiée, et article 1531 du Code de Procédure Civile).  L’impartialité L’impartialité n’est pas, par hypothèse, consubstantielle à la profession d’Avocat, et particulièrement lorsque l’Avocat exerce la défense dans une instance judiciaire. Il est logique dès lors qu’elle ne figure pas au nombre des principes essentiels de la profession d’Avocat. L’article 6.2 avant-dernier alinéa du RIN prévoit cependant que l’Avocat chargé d’une mission d’arbitrage doit observer lui-même et faire observer le principe de la contradiction et de l’égalité à l’égard de toutes les parties à l’instance, obligation qui paraît évidemment opposable à l’Avocat médiateur, puisque le dernier alinéa de l’article 6.2 rappelle que l’Avocat, dans l’exercice de toutes les missions qui lui sont autorisées, demeure soumis aux principes essentiels, lesquels comportent notamment le principe de loyauté. Il serait évidemment considéré comme un acte de déloyauté le fait pour un Avocat médiateur de manquer à l’obligation d’impartialité.  Il faut, me semble-t-il, rattacher à l’obligation d’impartialité l’obligation faite à l’Avocat d’éviter les conflits d’intérêt. L’article 4.1 alinéa 2 du RIN prévoit que : « Sauf accord écrit des parties, il (l’avocat) s’abstient de s’occuper des affaires de tous les clients concernés lorsque surgit un conflit d’intérêt, lorsque le secret professionnel risque d’être violé, ou lorsque son indépendance risque de ne plus être entière ». Ce texte renvoie donc en sus de la notion de conflit d’intérêt, par ailleurs définie à l’article 4.2, mais aussi à deux principes fondamentaux, le secret professionnel et l’indépendance. Concernant le conflit d’intérêt, cette notion est précisée à l’article 4.2 du RIN au regard des fonctions de conseil d’une part, et de représentation et de défense d’autre part. L’article 4.1 alinéa 3 fournit le cadre de sa définition lorsqu’il indique que l’Avocat ne peut accepter l’affaire d’un nouveau client si le secret des informations données par un ancien client risque d’être violé, ou lorsque la connaissance par l’Avocat des affaires de l’ancien client favoriserait le nouveau client. Ce principe appliqué à la médiation, on retiendra que l’Avocat médiateur doit refuser toute mission qui concernerait l’un de ses clients actuels ou anciens, ou un de ses adversaires. Cette interdiction s’applique également aux clients ou adversaires de ses Associés. L’Avocat médiateur doit de même refuser sa mission en cas de risque sérieux de conflit d’intérêt ou se déporter lorsque ce risque apparaît en cours de mission (article 4.2 dernier alinéa du RIN).  Le secret professionnel Il résulte de l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 selon lequel : « En toutes matières, que ce soit dans les domaines du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un Avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son Avocat, entre l’Avocat et ses confrères, à l’exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle », les notes d’entretien et plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ». Ce principe est repris par l’article 2 du RIN, qui précise que le secret professionnel de l’Avocat est d’ordre public, qu’il est général, absolu et illimité dans le temps, et qu’il résulte du fait que l’Avocat est le confident nécessaire du client. Le secret professionnel justifie la confiance placée par le client en son Avocat, et est indissociable de l’indépendance qui caractérise par ailleurs l’exercice de la profession d’Avocat. Rappelons que la violation du secret professionnel est un délit susceptible de poursuites correctionnelles. L’article 226-13 du Code Pénal dispose en effet que la révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire, soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, par exemple une mission de médiation, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende.  L’indépendance En prêtant serment, l’Avocat jure d’exercer ses fonctions avec indépendance, et l’obligation d’indépendance figure également parmi les principes essentiels de la profession d’Avocat rappelés à l’article 1 du RIN. Pour ADER et DAMIEN, cette indépendance doit être matérielle, morale et intellectuelle, et s’exercer à l’égard de tous, clients inclus. Le respect nécessaire de l’obligation d’indépendance nourrit actuellement le débat sur la possibilité d’exercer la profession d’Avocat comme Avocat salarié en entreprise. Pour en revenir à la médiation, il apparaît que les différentes obligations professionnelles imposées à l’Avocat par son Règlement Intérieur National rappelées ci-dessus garantissent, à peine de sanctions disciplinaires, son impartialité dans l’exercice de toute mission de médiation, qu’elle soit judiciaire ou conventionnelle. L’obligation de compétence Elle figure parmi les principes essentiels de la profession d’Avocat déclinés à l’article 1.3 du RIN. Son corrolaire est l’obligation de formation continue imposée aux Avocats par l’article 14.2 de la loi du 31 décembre 1971, réglementée aux articles 85 et suivants du décret du 27 novembre 1991 et la décision à caractère normatif n° 2011-004 du Conseil National des Barreaux en date du 25 novembre 2011. Le défaut de respect de cette obligation de formation continue est, s’agissant de la violation d’une obligation professionnelle, susceptible de conduire à des poursuites disciplinaires. Je crois qu’il est manifeste que le respect de cette obligation, constitue au contraire une garantie importante de compétence au justiciable s’engageant dans la voie de la médiation, lorsqu’un Avocat est désigné comme médiateur. L’obligation de diligence L’obligation de diligence figure également parmi les principes essentiels de la profession d’Avocat. Selon ADER et DAMIENS, elle s’entend comme l’obligation faite à l’Avocat de montrer une grande disponibilité et d’apporter un soin appliqué et attentif à la défense de son client. Ce devoir transposé à la médiation, il s’agit d’apporter un soin appliqué et attentif à l’exécution de la mission confiée. Il en résulte, toujours selon ADER et DAMIEN, que l’Avocat ne doit tout particulièrement pas, pour quelque motif que ce soit, négliger un dossier, devant préférer s’en dessaisir. Le respect de cette obligation est également prévu à peine de poursuites disciplinaires, sans préjudice de la mise en œuvre d’une éventuelle action en responsabilité civile professionnelle, si la négligence opposée à l’Avocat a été génératrice d’un préjudice. L’obligation de confidentialité Cette obligation résulte implicitement pour l’Avocat de l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, qui consacre le secret professionnel de l’Avocat. Elle est expressément prévue à l’article 3 du RIN, l’article 3.1 précisant que « Tous échanges entre Avocats, verbaux ou écrits, quel qu’en soit le support (papier, télécopie, voie électronique…), sont par nature confidentiels ». Les correspondances entre Avocats, quel qu’en soit le support, ne peuvent en aucun cas être produites en justice, ni faire l’objet d’une levée de confidentialité. L’exercice de la confidentialité ne sera donc pas insurmontable pour l’Avocat médiateur, qui, s’il y manquait, pourrait faire l’objet de poursuites disciplinaires, indépendamment de toute éventuelle action en responsabilité civile professionnelle. Il sera rappelé que, pour l’Avocat médiateur, comme pour tout médiateur, la confidentialité empêche notamment la divulgation aux tiers ou l’invocation ou la production dans le cadre d’une instance judiciaire ou arbitrale, de toutes les constatations du médiateur et des déclarations par lui recueillies au cours de la médiation, sauf en présence de raisons impérieuses d’ordre public ou de motifs liés à la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, ou à l’intégrité physique ou psychologique de la personne, ou encore lorsque la révélation de l’existence de la divulgation du contenu de l’accord issu de la médiation est nécessaire pour sa mise en œuvre ou son exécution. IV. Le Code National de Déontologie du Médiateur et de la Médiation impartit au médiateur qui accepte de se soumettre à ses dispositions de respecter les obligations de formation, d’indépendance, de neutralité, d’impartialité, de loyauté, de confidentialité. Nous venons de voir que ces obligations sont également imparties à l’Avocat par les textes légaux et réglementaires qui lui sont applicables, et qu’ils le sont à peine de poursuites disciplinaires, notamment lorsqu’il exerce des fonctions de médiateur. Le Code National de Déontologie du Médiateur et de la Médiation impartit en outre au médiateur de délivrer aux parties une information présentant la médiation et ses modalités d’une façon complète, claire et précise, et de s’assurer de ce que leur consentement est libre et éclairé. Lorsque la médiation est décidée par le Juge, cette obligation pèse d’abord sur lui (article 131-1 du Code de Procédure Civile), mais elle pèse également sur l’Avocat tenu d’exercer ses fonctions avec probité, dans le respect des termes de son serment, et qui doit respecter en outre, dans cet exercice, le principe de loyauté. Cette obligation l’amènera nécessairement à vérifier la bonne information des parties à la médiation sur l’objet et les modalités de celles-ci, ainsi que leur consentement, que la médiation soit conventionnelle ou judiciaire. On peut en conclure que sans avoir à consentir à se soumettre aux obligations résultant du Code National de Déontologie du Médiateur et de la Médiation, l’Avocat médiateur y est néanmoins soumis, tout manquement étant susceptible de faire l’objet d’une poursuite disciplinaire, indépendamment de toute action en responsabilité civile professionnelle. Seront rappelées à ce sujet les dispositions de l’article 27 de la loi du 31 décembre 1971, selon lesquelles il doit être justifié, soit par le Barreau, soit collectivement ou personnellement par les Avocats, soit à la fois par le Barreau et par les Avocats, d’une assurance garantissant la responsabilité civile professionnelle de chaque Avocat membre du Barreau, en raison des négligences. Cette garantie bénéficie aux parties à une médiation judiciaire confiée à un Avocat.  L’article 131-13 du Code de Procédure Civile dispose que le Juge fixe la rémunération du médiateur, en cas de médiation judiciaire. Les textes sont silencieux concernant la rémunération du médiateur conventionnel. Le Code de Conduite Européen pour les Médiateurs prévoit seulement que les médiateurs doivent toujours fournir aux parties des informations complètes concernant le mode de rémunération qu’ils entendent appliquer et qui ne doit pas intervenir avant que ces principes aient été acceptés par toutes les parties concernées. Cette obligation d’information des parties pèse sur l’Avocat médiateur en vertu des dispositions de l’article 11.2 du RIN. Au cas où un litige viendrait à apparaître concernant la rémunération de l’Avocat médiateur entre celui-ci et les parties à la médiation, le recours au Bâtonnier paraît possible dans le cadre de la procédure d’arbitrage des honoraires prévue aux articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991. Il convient toutefois, afin d’éviter toute difficulté sur ce point, de le prévoir dans la convention de médiation.  Un dernier point de nature déontologique concerne la publicité que l’Avocat médiateur pourrait être tenté de faire de ses qualités de médiateur. Cette tentation peut être assouvie, me semble-t-il, dans le respect des dispositions de l’article 10 du RIN. L’article 10.1 dispose en effet que la publicité est permise à un Avocat si elle procure une information au public, et si sa mise en œuvre respecte les principes essentiels de la profession, l’article 10.2 prohibant seulement la publicité mensongère, les mentions laudatives ou comparatives, toutes mentions susceptibles de créer l’apparence d’une qualification professionnelle non reconnue, toutes mentions susceptibles de créer, dans l’esprit du public, l’apparence d’une structure d’exercice inexistante, toutes références à des fonctions ou activités sans lien avec l’exercice de la profession d’Avocat, toutes mentions susceptibles de porter atteinte au secret professionnel et toutes indications contraires à la loi. Toutes les dispositions de l’article 10 concernant les formes et le contenu de la publicité, ainsi que les dispositions complémentaires relatives aux annuaires professionnels ainsi qu’à la publicité par Internet, devront être respectés.