Manquement au devoir de conseil – Responsabilité de la banque

Cour d’Appel de BORDEAUX 1ère Chambre Civile, 28 février 2018 (RG 16/07290)

Les époux X avaient engagé la responsabilité de leur banquier auprès duquel ils avaient placé la somme de 1 500 000 € résultant d’un gain au loto, exprimant le souhait que ces placements leur rapportent un revenu mensuel de 5 000 €.

Ils estimaient en effet que ce banquier avait manqué à son devoir de conseil :

  • en orientant leurs fonds vers des placements en assurance-vie inadaptés,
  • en ne les dissuadant pas de prêter des fonds à l’entreprise immobilière de leur fils que, pourtant, la banque avait elle-même refusé de financer, en ne les orientant pas vers un prélèvement fiscal libératoire plus avantageux pour eux que l’impôt sur le revenu.

Un jugement avant dire droit ayant ordonné une expertise pour évaluer ces différents chefs de préjudice, le Tribunal de Grande Instance devait ensuite débouter les époux X de toutes leurs demandes, sauf celles relatives au défaut de conseil en matière de prélèvement libératoire, après avoir écarté les autres manquements allégués dès son jugement préparatoire ayant ordonné l’expertise.

Après avoir confirmé le jugement sur le défaut de conseil en matière fiscale, la Cour devait substantiellement le réformer en retenant toutefois que les époux X ne pouvaient pas reprocher à la banque de les avoir orientés vers des supports d’assurance-vie pour leur assurer des revenus mensuels de 5 000 € sauf à consommer le capital, alors que le fait qu’ils avaient accepté d’augmenter, à compter de juillet 2006, les rachats pour une somme supérieure à 5 000 € par mois montrait qu’ils avaient agi en connaissance de cause, ce qui les privait de grief contre la banque de ce chef.

Les époux X reprochaient, en outre, à la banque de ne pas les avoir dissuadés de procéder à des demandes d’avance de remboursement des placements effectués afin de financer l’entreprise de leur fils, alors que, d’une part, ces avances entraînaient ipso facto la réduction dans le temps de leurs possibilités de procéder mensuellement à des rachats partiels de 5 000 € et, d’autre part, le déblocage de ces avances générait pour eux des intérêts importants.

La Cour a confirmé le débouté sur le premier point mais, en revanche, elle a estimé qu’il pouvait être reproché à l’organisme bancaire d’avoir omis d’attirer l’attention de ses clients sur l’importance des intérêts qu’ils allaient devoir acquitter pour les avances litigieuses et sur l’opportunité de limiter ces avances dans le temps.

Elle estime par ailleurs que la banque a commis un second manquement dans son devoir de conseil en laissant les époux X présenter de nouvelles demandes d’avance, augmentant leur montant total, sans les informer que le montant global des avances allait être tel qu’il allait faire obstacle au maintien des rachats partiels programmés sur les fonds placés en assurance-vie, alors qu’elle savait qu’il s’agissait de la finalité initiale de l’opération.

Marc DUFRANC

Droit bancaire
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