Roland-Garros : Jeu, set et …. taxes

A mi-chemin de la quinzaine de Roland-Garros, outre l’aspect sportif qui est par évidence primordial, la question de la fiscalité des prize-money se pose.

Cette édition 2022 de Roland-Garros met en jeu une dotation globale de 43,6 millions d’euros, les deux vainqueurs du simple messieurs et du simple dames touchant chacun 2.200.000 euros.

Si les sommes perçues par les futurs vainqueurs sont conséquentes, le poids des taxes ne doit pas être négligé.

Au regard de l’élimination précoce de nos représentant(e)s français(es) (dont un certain nombre d’ailleurs ne sont pas résidents fiscaux en France), nous nous attacherons au traitement fiscal des sommes perçues par les joueurs non-résidents dans la mesure où les futurs vainqueurs se trouvent parmi eux.

Règles de droit interne

Ainsi, les gains perçus par les joueurs non-résidents font l’objet d’une retenue à la source au taux de 15% en application des dispositions de l’article 182 B du Code général des impôts (CGI).

Les vainqueurs toucheront donc la somme nette de 1.870.000 € tandis que l’Etat Français prélèvera la somme de 330.000 €.

Toutefois, cette retenue n’est pas libératoire de l’impôt sur le revenu dû en France.

En effet, ils devront alors déposer l’année suivante une déclaration au titre de ces revenus (le cas échéant avec la présence d’autres revenus de source française) et la retenue s’imputera sur le montant de l’impôt dû (application du barème progressif de 0 à 45%).

Compte tenu des sommes perçues, il apparaît que le taux marginal d’imposition pourra aisément atteindre le taux de 45%, étant précisé qu’en tout état de cause un taux minimal d’imposition de 20% s’applique.

L’Etat Français apparaît donc également comme un grand gagnant du Tournoi de la Porte d’Auteuil.

Le fait que la retenue n’est pas libératoire de l’impôt sur le revenu dû en France est une particularité française. En effet, pour de nombreux pays, la retenue à la source est le plus souvent libératoire. Par exemple, le gagnant de l’US OPEN se voit prélever 30% de son gain par l’Etat Fédéral (plus une taxe selon les Etats).

Afin de simplifier le système français, des sénateurs ont proposé fin 2021 la mise en place d’une retenue à la source libératoire. Mais cet amendement a finalement été retiré.

Incidences des conventions fiscales

En matière internationale, l’existence de conventions fiscales est susceptible de modifier le lieu d’imposition.

Toutefois, la plupart des conventions fiscales conclues entre la France et les Etats de résidence des joueurs attribuent le droit d’imposer à l’Etat d’exercice de l’activité, c’est-à-dire à l’Etat Français ce qui ne modifie en rien les modalités d’imposition ci-avant décrites.

Par exemple, les gains de Raphael NADAL ont été imposés en France au regard de la convention Franco-Espagnole. L’éventuelle double imposition qui pourrait en résulter est traitée par cette convention.

Par exception, certaines conventions telle que la convention avec les Emirats Arabes Unis conduisent à attribuer le droit d’imposition à l’Etat de Résidence.

Ainsi, les nombreux joueurs installés à Dubaï (résidents fiscaux) sont alors imposables seulement aux Emirats Arabes unis, leur permettant ainsi d’échapper à la retenue de 15% et, surtout, à l’impôt sur le revenu en France.

En conclusion, si les sommes perçues peuvent facialement être importantes, les impositions afférentes s’avèrent être le plus souvent significatives ce qui fait par exemple dire à Danil MEDVEDEV, actuel n°2 mondial : « si vous gagnez un million d’euros en France, vous devez payer une taxe de 45% de cet argent, si je ne me trompe pas. Vous pouvez atteindre la finale de Roland Garros, obtenir un million et demi d’euros, et être heureux de ne payer qu’une taxe de 15%, pour déposer un montant proche de 1,3 million d’euros sur votre compte bancaire. Mais en fin de saison, il faut savoir que vous devrez payer une nouvelle taxe proche de 400 000 € ou 500 000 € à l’Etat français ! Au bout du compte, en ajoutant aussi les taxes, les déplacements et les salaires de votre équipe de travail, on arrive à la moitié de tous les revenus que vous avez gagnés ».

Le Cabinet AVOCAGIR accompagne les entreprises et les particuliers pour toute question relative à la fiscalité internationale.

Article co-écrit par Madame Pauline BRUTE DE REMUR sous la direction Maître Antoine BENDERDOUCH

Antoine BENDERDOUCH

Droit fiscal et procédure fiscale
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