Tribunal administratif de BORDEAUX-jugement du 3 octobre 2016, RG 1400907°

L’immixtion est fautive à la double condition qu’elle émane d’une personne notoirement compétente, et qu’elle se traduise par une ingérence telle que le maître de l’ouvrage prend, en fait, la responsabilité technique de l’opération par des actes positifs ( Cour de Cassation, 10 octobre 1979 : JCP éd. G 1979 IV p. 370 ).

Mademoiselle CANTELAUBE montre fort bien qu’en droit public :  » Le maître de l’ouvrage est techniquement compétent et armé du pouvoir juridique considérable ».

(La responsabilité décennale des entrepreneurs en droit public, Eyrolles, 1967, p. 105).

En jurisprudence, la compétence technique d’un maître d’ouvrage public a pu être considérée comme notoire, s’agissant par exemple de la pose de revêtements de sols (CAA PARIS, 1er février 2010, SA RECHERCHE ET ASSISTANCE POUR L’AMELIORATION DE L’HABITAT, req. N° 07 PA01535).

Monsieur Moderne ajoute que l’Administration serait fautive d’accepter sans réserve des projets fantaisistes ou des techniques douteuses (MTP, 6 février 1978, Chr. spécial, p. 26, 2° et 3° Col).

Le Tribunal administratif de BORDEAUX a récemment parfaitement rappelé que BORDEAUX METROPOLE était doté de services techniques compétents et que sa responsabilité était susceptible d’être retenue dans les litiges de construction liés à la survenance de désordres en cas de faute de sa part: « 13. Considérant qu’il résulte de l’instruction, et notamment des rapports d’expertise, que le cahier des clauses techniques du marché de travaux faisait référence à un trafic « TC » correspondant à des trafics quotidiens de 30 poids lourds et 80 bus, et prévoyait un dimensionnement de la chaussée et un choix de matériaux adaptés à ce trafic ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que Bordeaux Métropole aurait alerté le maître d’oeuvre, en charge de la rédaction de ces documents contractuels, de la sous-évaluation du trafic des poids-lourds, alors qu’elle avait rédigé un programme d’aménagement d’espaces publics concomitants au projet de tramway pour la place de la Victoire renvoyant, pour les espaces liés à la circulation, à la référence de trafic TC5 20 selon la norme LCPC-SETRA, ce qui correspond à la circulation de 2,5 à 6,5 millions de poids lourds sur une durée de vingt années, soit une fourchette de 287 à 748 poids lourds par jour et par sens de circulation, soit, au total, entre 574 et 1 496 poids lourds par jour ; qu’elle n’est pas non plus intervenue lorsque l’ordre de service n°6, qui lui a été transmis, a, d’une part, rectifié les estimations de trafic dans une proportion encore insuffisante, à hauteur de 600 véhicules par jour, d’autre part prévu une structure composée d’un lit de pose en mortier au lieu d’un sable sans ciment, ce qui n’est pas admis, pour un tel trafic, par la norme NFP 98-335 qui, bien que non rendue obligatoire à la date des travaux litigieux, était d’usage commun ; que, compte tenu notamment de l’importance de ses services techniques, Bordeaux Métropole a fait preuve d’une négligence fautive ; que les fautes ainsi commises sont de nature à exonérer les participants aux travaux d’une partie de leur responsabilité ».

La compétence de la Métropole de BORDEAUX doit être appréciée à l’aulne des services techniques importants dont elle dispose.

Jean CORONAT

Avocat associé